Sommaire:
Qu'est
ce que le PSA
Valeur "normale" du PSA
Variabilité du PSA
PSA libre et total
Pour allez plus loin.
Qu'apporte
le PSA en pratique ?
dépistage de masse et PSA: oui ou non ?
dépistage individuel chez un patient
asymptomatique.
intérêt du PSA en dehors du dépistage.
conclusion.
PSA signifie Prostatic Spécific Antigene.
Le PSA est une glycoprotéine sécrétée
par les cellules glandulaires de la prostate. Elle est donc spécifique
de la prostate mais non du cancer et n’est donc pas au sens strict un marqueur
tumoral.
Elle rentre dans la composition du liquide séminal
ou elle est retrouvée à des taux très importants.
Dans le sérum cette protéine est retrouvée soit sous forme libre, soit sous forme liée à un autre complexe moléculaire (l’alpha-1-antichymotrypsine ou l’alpha-2-macroglobuline). Seules les formes libres et liées à l’alpha-1-antichymotrypsine peuvent actuellement être dosées.
On dose habituellement le taux global du PSA dit PSA total dont la valeur, dite
normale, doit être inférieure à un seuil qui est habituellement
inférieur à 4 ng/ml. Mais cette valeur est variable selon:
- la méthode de dosage utilisée par le laboratoire.
Il est donc important de retourner si possible dans le même laboratoire
pour faire surveiller son taux de PSA.
- la taille de la prostate. Plus les cellules prostatiques
sont nombreuses plus le PSA peut être élevé. On peut tenir
compte de ce facteur en calculant la densité de PSA qui est le rapport
entre le taux de PSA et le poids estimé de la glande prostatique en grammes.
Il doit se situer en pratique en dessous de 0,1 ng/ml/grammes.
De plus le PSA subit chez un même individu des variations physiologiques rapides de l’ordre de 20 à 30 %.
Le PSA est utilisé pour dépister le cancer de prostate. Toutefois,
son taux peut s'élever dans d'autres circonstances dont il faudra tenir
compte pour l'interpréter.
Il est habituel de dire que le toucher rectal ou l'échographie
endorectale peuvent faire monter le taux de PSA mais cette élévation
lorsqu'elle est constatée n'en modifie guère l'interprétation.
Dans la mesure du possible, il est préférable pour cette raison
d'attendre une dizaine de jours après un tel examen et la prise de sang.
De même, l'éjaculation peut faire varier le PSA.
Par contre la prostatite aiguë, infection de la prostate,
peut faire monter de façon parfois très importante, le taux de
PSA.
Plus récemment, le dosage du PSA libre permet d’affiner un dosage « limite » entre 4 et 10 ng/m. En effet, la proportion de PSA libre diminue dans les cancers de prostate et un rapport PSA libre/total bas (< 15 %) pour un taux total situé entre 4 et 10 ng/ml poussera si le contexte s’y prête, à la réalisation de biopsies.
QU'APPORTE LE PSA EN PRATIQUE ?
Qu’apporte-t-il en pratique ?
Pour
un dépistage de masse ?, un dépistage
individuel ?
En dehors du cadre du dépistage du cancer de prostate ?
- dans le bilan d’une pathologie prostatique
symptomatique ?
- dans la surveillance après traitement
d’un cancer prostatique ?
DEPISTAGE DE MASSE ET PSA: OUI ou NON ?
Pour
être justifié, l’OMS définit pour un dépistage de
masse, des critères d’ordre médicaux et économiques :
La maladie doit représenter un important problème
de santé publique.
La maladie doit pouvoir être diagnostiquée à
un stade précoce.
L’histoire naturelle de cette maladie doit être connue
du stade latent au stade clinique.
Il doit exister un traitement efficace pour les patients
atteints de cette maladie.
Il doit exister un test performant pour le dépistage.
Ce test doit être acceptable pour la population.
Le dépistage doit apporter un bénéfice
en terme de santé publique, et ce bénéfice doit être
analysé en intégrant les facteurs économiques (a-t-on les
moyens de le mettre en œuvre ?).
Si l’on analyse, dans le cadre dépistage du cancer de prostate par le dosage du PSA ces différents critères, l’actuelle recommandation du non intérêt du dépistage de masse du cancer de prostate trouve des arguments :
- L’incidence du cancer de prostate, très liée à l’âge,
est en augmentation, mais la mortalité spécifique de ce cancer
semble augmenter moins vite que son incidence. L’impact en terme d’années
de vie perdues est donc nettement moins important que pour d’autres cancers
atteignant des populations plus jeunes (poumon, colon, sein,..). L’augmentation
de l’incidence porte surtout sur les formes localisées. Le cancer de
prostate est donc un problème de santé publique mais moins important
que ne le laisserait supposer son incidence élevée.
- Le cancer de prostate peut être
diagnostiqué à un stade latent par la réalisation de biopsies
prostatiques échoguidées par voie transrectale. Toutefois, la
prévalence de cette affection n’étant que très mal connue
(en dehors de séries autopsiques), la valeur de ce test diagnostique
reste mal connue.
- L’histoire naturelle de la maladie
demeure mal connue. La progression du cancer de prostate apparaît très
lente. Il a été estimé que si 30 à 40 % des hommes
de plus de 50 ans étaient porteurs d’un cancer de prostate, 8 à
9 % deviendrait « cliniquement significatifs » et moins de 5 % ont
une probabilité d’en décéder. Cet argument va donc contre
un dépistage de masse qui ferais « surtraiter » la plupart
des cancers de prostate diagnostiqués par le dépistage systématique,
tant que nous n’auront pas des éléments cliniques, biologiques
et histologiques fiables qui permettrons de distinguer ceux qui évolueront
vers une progression létale et ceux qui resteront asymptomatiques.
- Il doit exister un traitement efficace
pour les patients atteints de cette maladie. Actuellement, il est difficile
de trancher de façon irréfutable mais les études par modélisation
mathématiques sont en faveur d’un traitement radical par prostatectomie
ou radiothérapie devant un cancer localisé de la prostate peu
ou moyennement différencié, chez un patient de moins de 70 ans,
plutôt qu’à une attitude de surveillance et traitement différé.
Une étude de Lu-Yao en 1997 conclut en un avantage pour la prostatectomie
lorsque le grade de la tumeur augmente. La survie spécifique à
10 ans des patients dont la tumeur est intra-capsulaire et traités par
prostatectomie radicale est de 90 %, soit au moins équivalente à
celle d’hommes d’âges équivalents dans la population générale.
La surveillance avec traitement différé lors de l’apparition de
symptômes est l’attitude raisonnable devant une petite tumeur, de faible
grade survenant chez un patient ayant une espérance de vie inférieure
à 10 ans.
- Il doit exister un test performant
pour le dépistage. L’association dosage du PSA et toucher rectal semble
la plus performante. Toutefois le dosage du PSA, non spécifique du cancer,
pose des problème de variabilité selon les méthodes utilisées,
la définition d’une valeur seuil étant essentielle pour définir
la valeur d’un test. Dans le cadre d’un dépistage l’association TR et
PSA détecte un cancer de prostate dans 5,8 % des cas (Catalona, 1994).
Le PSA seul détecte 3 à 4,6 % de cancer de prostate. La stratégie
optimale reste à définir en tenant compte des critères
économiques.
- Ce test doit être acceptable
pour la population. Or si le dosage du PSA et le toucher rectal semblent acceptables,
il semble que pour des hommes faisant l’objet d’une campagne de dépistage
systématique, après information concernant les risques liés
au cancer de prostate et les effets secondaires des traitements, ceux-ci refusent
souvent le dépistage ou sont incapables de prendre une décision
de choix de traitement en cas de découverte d’un cancer.
Ces éléments ayant fait l’objet d’un rapport très bien documenté de l’ANAES en mai 1998 permettaient donc de conclure qu’ il semblait en effet non recommandé d’envisager un dépistage de masse, donc systématique. Il faut toutefois noter que ces recommandations découlaient essentiellement de l’absence de données comparatives et statistiquement significatives permettant de conclure de façon nette et sans ambiguités entre les différentes attitudes thérapeutiques. Plusieurs études internationnales sont en cours pour tenter de préciser l'intérêt actuel d'un dépistage de masse du cancer de prostate mais les résultats ne sont pas encore disponibles.
Il
est important de rappeler que:
- seul le dépistage permet le diagnostic
d'un cancer de prostate au stade localisé donc curable et donc la diminution
du risque de décès lié au cancer de prostate. Un cancer
de prostate diagnostique avant 65 ans, tue 3 fois sur 4 s'il n'est pas traité
(Recommandations du CCAFU 2002).
- le dépistage ne doit s'adresser qu'aux
hommes dont l'âge justifie un éventuel traitement curateur soit
entre 50 et 75 ans, et aux hommes prêts à en accepter les conséquences.
- le dépistage associe un dosage du PSA
et un toucher rectal. La valeur seuil du PSA est actuellement fixée à
4 ng/ml mais il est discuté d'en abaisser la valeur.
DEPISTAGE INDIVIDUEL CHEZ UN PATIENT ASYMPTOMATIQUE
Le dépistage individuel reste de ce fait parfaitement justifiable pour un patient donné. S’il est demandé dans le cadre d’un dépistage même individuel, il est logique de considérer qu’un résultat anormal doit déboucher sur la réalisation de biopsies et un éventuel traitement radical si celles-ci révèlent une tumeur maligne. Il doit donc être fait dans l’intention de traiter radicalement et doit par conséquent s’adresser aux patients susceptibles d’être traités de cette façon donc ceux ayant une espérance de vie de plus de 10 ans.
En pratique, ce dépistage peut être proposé chez les hommes de 50 à 70 mais bientôt de 75 ans, ce d’autant qu’ils ont plusieurs antécédents familiaux de cancer de prostate. La périodicité du contrôle ultérieur lorsque le résultat initial est normal reste empirique mais il est logique de considérer qu’un délai d’un à 2 ans est suffisant compte tenu du temps de doublement de cette tumeur. Si les résultats du toucher rectal et du PSA sont normaux, si tumeur il existe, celle-ci reste d’un volume non significatif et après doublement soit en moyenne 2 ans, elle a toute probabilité de rester localisée donc de pouvoir être traitée de façon curatrice si le terrain le permet.
La « normalité » ou « l’anormalité» du résultat du dosage du PSA dépend certes du seuil du kit de dosage utilisé par le laboratoire (ces seuils étant différents d’une technique à l’autre mais le seuil de 4 ng/ml est généralement retenu) mais également d’autres éléments qui permettent d’interprèter et affiner ce taux en diminuant le nombre de faux négatifs et en améliorant sa valeur prédictive positive.
Le PSA subit chez un même individu des variations physiologique rapides de l’ordre de 20 à 30 %. D’autre part le taux est corrélé à l’âge du patient probablement du fait du développement d’une hypertrophie prostatique bénigne donc de l’augmentation de volume de la glande. La vélocité du PSA ou pente de croissance du PSA fait intervenir la différence de croissance donc de concentration sérique du PSA entre le tissu tumoral et le tissu normal ou adénomateux. Une élévation de plus de 0,75 ng/ml/an a été proposé comme seuil mais l’apport de cette variable n’a pas été statistiquement démontré même si elle paraît a priori intéressante. De même, la densité du PSA soit le rapport entre le taux du PSA et la taille de la glande (ou de la zone transitionnelle pour certains) a été proposé, le tissu néoplasique ayant relarguant concentration sérique de PSA de l’ordre de 3 ng/ml par grammes de tumeur alors que le tissu normal ou adénomateux ne produit que 0,3 ng/ml/g soit 10 fois moins.
Plus récemment, le dosage du PSA libre permet d’affiner un dosage « limite » entre 4 et 10 ng/m. En effet, la proportion de PSA libre diminue dans les cancers de prostate et un rapport PSA libre/total bas (< 15 %) pour un taux total situé entre 4 et 10 ng/ml poussera si le contexte s’y prête, à la réalisation de biopsies.
Aucun de ces indicateurs n’étant suffisamment performant à lui
seul, c’est en pratique l’ensemble de ces éléments sans oublier
le patient et ses inquiétudes qui modifieront l’attitude et rendent le
suivi d’algorythmes décisionnels parfois difficile à suivre à
la lettre. Si l’on veut rester schématique :
- après 75 ans : le PSA est
utile si l’on suspecte un cancer de prostate associé à une hyperplasie
et dont l’existence et l’importance modifierais le traitement global.
- Avant 70 ans, et en l’absence de
facteur de comorbidité abaissant l’espérance de vie à moins
de 10 ans, et en l’absence d’anomalie suspecte au toucher rectal :
o un PSA
supérieur à 10 ng/ml en dehors d’un contexte infectieux,
o et/ou un
PSA entre 4 et 10 ng/ml avec un rapport PSA L/T inférieur à 10
%
o et/ou un
PSA dont l’évolution est anormalement rapide (de plus de 0,75 ng/ml/an),
o et/ou une
densité de PSA supérieure à 0,25 ng/ml/g,
doivent faire discuter la réalisation de biopsies
prostatiques ou au minimum une surveillance clinique et du PSA dont le rythme
peut également se discuter. Un contrôle 6 mois plus tard paraît
être un bon compromis.
Lorsque des biopsies ont été réalisées devant une anomalie au toucher rectal, ou sur un PSA anormal, si celles-ci s’avèrent normales, il est alors préférable de recontrôler le PSA, 6 à 12 mois plus tard. Si le taux continue sa progression, peut se discuter une nouvelle série de biopsies que l’on réalisera alors plutôt sous anesthésie afin d’augmenter le nombre de prélèvements, en y associant éventuellement la résection endoscopique d’un adénome si celui-ci est d’un volume significatif dans l’hypothèse d’une lésion dans la zone transitionnelle. Si ces nouvelles biopsies ne montrent pas de lésion tumorale, il est alors peu utile de refaire des biopsies à court et moyen terme.
INTERET
DU PSA EN DEHORS DU DEPISTAGE
Bilan d’une pathologie :
En dehors de ce cadre du dépistage individuel, le dosage du PSA associé au toucher rectal peut être utile chez un patient présentant des troubles mictionnels nécessitant un traitement médical ou éventuellement chirurgical. En effet, la notion d’un cancer de prostate peut modifier même chez un patient âgé le protocole thérapeutique. Par exemple, il fera parfois décider un traitement hormonal au lieu ou en complément d’une résection endoscopique s’il existe un cancer de prostate associé à une hypertrophie bénigne. L’existence d’un cancer de prostate associé à un adénome fonctionnellement gênant pourra faire décider une prostatectomie au lieu d’une simple résection endoscopique de prostate si le patient est encore relativement jeune.
Surveillance du traitement d’un cancer de prostate :
Dans le cadre d’un cancer de prostate, le dosage du PSA apporte un intérêt dans la surveillance après ou sous traitement :
- après prostatectomie radicale, c’est la persistance d’un PSA indosable qui est le meilleur signe de guérison. Sa réascension, signe la récidive biologique qui précède le plus souvent de plusieurs mois voire années, la récidive clinique.
- Après radiothérapie, après un phase généralement ascendante transitoire, le PSA décroit progressivement pour atteindre un palier dont la valeur à une signification pronostique quant au risque de récidive (NADIR).
- Sous traitement hormonal, l’effondrement du PSA et sa vitesse de décroissance, témoigne du caractère hormono-sensible et du contrôle tumoral obtenu par la castration chimique ou chirurgicale. Sa réascension marque l’échappement hormonal tournant évolutif dans cette maladie : en effet, la plupart des patients décèderont alors dans les 2 années suivantes.
- Enfin, dans le cadre d’une stratégie d’abstention-surveillance avec traitement différé si nécessaire, la courbe d’évolution du PSA permet de vérifier l’absence d’évolution anormalement rapide de la tumeur, en association avec le toucher rectal. Une évolutivité anormale, bien supérieure au temps de doublement naturel et habituel conduira en effet à mettre en œuvre un traitement, le plus souvent hormonal.
PSA, DEPISTAGE DU CANCER: CONCLUSION
En conclusion, faire doser un PSA implique que son résultat soit susceptible de modifier une attitude, changer un traitement, pousser à faire un diagnostique en intention de traiter. Il pose le problème du traitement d’un cancer localisé de prostate.
Beaucoup d’inconnues demeurent dans la compréhension de cette maladie : son histoire naturelle, l’efficacité à long terme et comparative des différentes attitudes thérapeutiques.
La décision d’un dépistage pour un patient donné, puis le choix du traitement « idéal » une fois le cancer diagnostiqué, doit donc tenir compte de ses éléments et ne peut se résumer en un arbre décisionnel figé. Il est le plus souvent préférable de ne pas chercher à avoir la preuve d’un cancer de prostate chez un patient âgé, asymptomatique chez lequel on palpe un nodule prostatique induré manifestement néoplasique. L’attitude doit donc rester pragmatique et adaptée au patient, à son âge, sa symptomatologie et sa psychologie.
Docteur B. d'ACREMONT - Mise à jour 23 février 2010