CANCER DE LA PROSTATE

Sommaire

La prostate
Définition - épidémiologie
Facteurs de risque
Anatomo-pathologie
Score de Gleason
Quelles sont les circonstances de découverte d'un cancer de prostate ?
Le PSA
Le diagnostic de cancer de prostate: les biopsies prostatiques.
Le bilan d'extension
La classification TNM
Les tables de PARTIN
Les méthodes de traitement
Les indications thérapeutiques
Les résultats
La surveillance active
Le dépistage de masse du cancer de prostate ?
Le dépistage individuel du cancer de prostate.
Documents annexes.

 

LA PROSTATE

    Une prostate normale pèse environ 15 à 20 grammes. Son poids augmente progressivement avec l'âge du fait du développement de la partie centrale qui forme un adénome, plus exactement appelé hypertrophie bénigne de la prostate. Son rôle est important dans l'activé de reproduction car sa sécrétion glandulaire entre dans la composition du sperme et lui améliore son pouvoir fécondant. C'est de plus un carrefour entre la voie génitale et la voie urinaire: le confluent entre les canaux éjaculateurs et l'urètre se situe au niveau du veru montanum, à la partie postérieure et distale de l'urètre prostatique. La prostate n'intervient pas dans les mécanismes de la continence assurés quant à eux par le col vésical et le sphincter lisse d'une part, et le sphincter strié urétral situé pour le second au-dessous de la prostate.

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DEFINITION - EPIDEMIOLOGIE

    Le cancer de prostate est une affection très fréquente mais ne représente que la seconde cause de mortalité par cancer chez l'homme après  60 ans. Son pic de fréquence se situe dans la 8ème décennie. Sa prévalence est très importante car on considère que si tous les hommes vivaient centenaires, on leur retrouverait pratiquement dans tous les cas un cancer de prostate en leur faisant une étude histologique systématique de leur prostate. Toute la difficulté actuelle du dépistage consiste à ne faire le diagnostic de cancer de prostate que chez les seuls patients pour lesquels le cancer aura un retentissement clinique, donc sur leur espérance de vie et/ou sur leur qualité de vie. Le dépistage de masse systématique a été jusqu'à présent non recommandé (Recommandations de l'ANAES puis HAS). Le résultat de deux grandes études randomisées (PLCO aux USA et ERSPC en Europe a donné lieu à de nouvelles discussion en 2012 sur l'intérêt du dépistage de masse du cancer de la prostate. En 2012, l’HAS a souligné l’absence d’intérêt démontré de la mise en oeuvre d’un dépistage systématique organisé par dosage du PSA dans une population d’hommes considérés à haut risque, comme elle l’avait déjà signifiée pour la population générale. L'étude ERSPC démontre un bénéfice en termes de survie spécifique de 21 % à 11 ans chez les hommes de 55 à 69 ans et une diminution de 41 % du risque de métastases dans le groupe dépisté mais au prix d'un risque de surtraitement. L’AFU (Association Française d'Urologie) recommande une détection précoce individualisée du cancer de la prostate avec une information éclairée sur les modalités, les enjeux et les risques éventuels liés aux différentes stratégies de prise en charge avec pour objectif essentiel de ne pas méconnaître un cancer agressif.

    L'incidence du cancer de prostate est estimée autour de 70 nouveaux cas par an et pour 100 000 hommes aux USA et est de l'ordre de 40/100 000 en France. Environ 70 000 nouveaux cas ont été diagnostiqué en 2009 en France. C'est le premier cancer en fréquence chez l'homme de plus de 50 ans en Europe et aux Etats Unis. Il représente environ 20 % de tous les cancers chez l'homme et constitue la seconde cause de mortalité par cancer chez l'homme (10 %) après le cancer du poumon (30 %). Il a entrainé environ 9000 décès en 2008. Depuis environ une décennie on observe une augmentation moindre de la mortalité par rapport à l'incidence, différence pouvant s'expliquer entre autre par un meilleur diagnostic des formes précoces (par le dépistage notamment) et par une meilleure efficacité des traitements.

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FACTEURS DE RISQUES

    On constate:
    - que l'incidence du cancer de prostate augmente avec l'âge.
    - que l'incidence du cancer de prostate varie selon les races (20 fois plus élevée chez le Noir américain que chez le Chinois).
    - que cette incidence raciale change lorsque ces mêmes populations migrent dans des zones à plus forte incidence mais sans atteindre cette dernière, suggérant donc la mise en cause de facteurs environnementaux (alimentaires).

    Les facteurs étiologiques sont encore mal connus. On peut toutefois relever certains facteurs de risques:
    - l'âge.
    - le facteur familial: il existe en effet une prédisposition familiale évidente dans environ 5 % des cas et probable pour 20 % supplémentaires. L'étude de ces familles ou sont retrouvés plusieurs cas de cancer de prostate va permettre de préciser les gènes prédisposants au cancer de prostate (études de Carter aux USA, étude Progène en France).
    - le facteur ethnique déjà cité.
    - le facteur hormonal: la prostate est une glande hormono-dépendante. L'hormone mâle, la testostérone est nécessaire à son développement (une castration avant la puberté protège du cancer de prostate). Un niveau élevé de testostérone augmente le risque mais on ne peut encore dire si c'est par une véritable facilitation de l'apparition ou si c'est une fois la tumeur apparue, en facilitant son développement. Ce facteur hormonal expliquerait l'incicence plus élevé chez les noirs américains ou le taux de testostérone est d'environ 15 % plus élevés que dans la race blanche.
     - les facteurs alimentaires: un régime riche en graisses animales saturés et pauvre en fibres augmente de façon importante le risque de cancer de prostate (probablement de part les modifications qu'il induit sur le métabolisme des hormones sexuelles), la vitamine D, le selenium, auraient un effet protecteur mal connu. Les antioxydants ont été également associés à une diminution du risque de cancer de prostate mais leur rôle et leur influence reste à préciser: il s'agit essentiellement du lycopène (retrouvé dans la peau de la tomate), dans une moindre mesure du béta-carotène,....

    A l'inverse certains facteurs n'ont jamais eu d'effet démontré sur l'incidence et le développement du cancer de prostate, dans un sens ou dans l'autre: l'activité sexuelle, le tabac, les infections urinaires ou prostatiques, l'association à un adénome prostatique, les interventions chirurgicales sur un adénome prostatique, la vasectomie,...

    De la poursuite de l'étude des facteurs de risque ou protecteurs, pourront être éventuellement proposés à l'avenir des traitements ou régimes préventifs. Actuellement aucune recommandation validée n'a pu être proposée.

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ANATOMO-PATHOLOGIE

    C'est un cancer glangulaire (ou adénocarcinome), dont l'évolution est très lente (le temps de doublement est en moyenne de 2 ans). Ce temps de doublement explique les survies spontanées longues observées.

    80 % des adénocarcinomes prostatiques se développent initialement aux dépends de la prostate périphérique et 20 % aux dépends de la prostate transitionnelle (celle à l'origine de l'hypertrophie bénigne de la prostate, beaucoup plus fréquente).

    Avant le stade d'adénocarcinome (tumeur cancéreuse infiltrante) on peut observer des lésions histologiques "pré-cancéreuses" les PIN (Prostatic Intra-épithélial Neoplasia). Ces lésions lorsqu'elles sont de haut grade, s'associent souvent à un adénocarcinome prostatique, justifiant ainsi une nouvelle série de biopsies prostatiques lorsqu'elles sont retrouvées isolées sur une première série de biopsies.

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SCORE DE GLEASON

    Lorsque l'on caractérise un cancer de prostate, on utilise deux classifications distinctes. L'une précise l'extension de la tumeur, c'est le stade TNM et la seconde caractérise ses caractères histologiques, c'est le score de Gleason.

    Le score de Gleason est donc l'étude de l'architecture microscopique histologique de la tumeur. Il s'obtient par l'étude des biopsies prostatiques ou sur la pièce opératoire après l'ablation complète de la prostate. 5 grades ont été définit par GLEASON. Le score de Gleason correspondant à l'addition des deux grades les plus représentés sur les pièces dont dispose l'anatomo-pathologiste, le plus représenté figurant en première position. Le score de gleason peut s'échelonner entre 1+1 et 5+5. Plus le score est élevé plus la tumeur est mal différenciée et donc à potenciel plus agressif.

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QUELLES SONT LES CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE D'UN CANCER DE PROSTATE ?

    Les signes cliniques et en particulier les troubles de la miction sont en général tardifs. Le diagnostic sera donc le plus souvent évoqué ou suspecté lors d'un examen prostatique ou un dosage de PSA systématique ou de surveillance, plus rarement sur une échographie. Parfois ce diagnostic est fait lors de l'analyse histologique des copeaux d'une résection endoscopique ou d'une pièce d'adénomectomie. Encore actuellement, c'est la découverte d'une métastase douloureuse qui peut dans certains cas faire découvrir le cancer.

    En effet l'évolution locale est en général lente et peu symptomatique. Par contre le cancer de prostate est un cancer très ostéophyle: le premier site métastatique est l'os, en premier lieu le rachis dorso-lombaire et le bassin.

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LE PSA

    PSA signifie Prostatic Spécific Antigene. Le PSA est une glycoprotéine sécrétée par les cellules glandulaires de la prostate. Elle est donc spécifique de la prostate mais non du cancer et n’est donc pas au sens strict un marqueur tumoral. Elle rentre dans la composition du liquide séminal ou elle est retrouvée à des taux très importants.
    Dans le sérum cette protéine est retrouvée soit sous forme libre, soit sous forme liée à un autre complexe moléculaire (l’alpha-1-antichymotrypsine ou l’alpha-2-macroglobuline). Seules les formes libres et liées à l’alpha-1-antichymotrypsine peuvent actuellement être dosées.
   On dose habituellement le taux global du PSA dit PSA total dont la valeur, dite normale, doit être inférieure à un seuil qui est habituellement inférieur à 4 ng/ml. Mais cette valeur est variable selon:
    - la méthode de dosage utilisée par le laboratoire. Il est donc important de retourner si possible dans le même laboratoire pour faire surveiller son taux de PSA.
    - la taille de la prostate. Plus les cellules prostatiques sont nombreuses plus le PSA peut être élevé. On peut tenir compte de ce facteur en calculant la densité de PSA qui est le rapport entre le taux de PSA et le poids estimé de la glande prostatique en grammes. Il doit se situer en pratique en dessous de 0,1 ng/ml/grammes.
    De plus le PSA subit chez un même individu des variations physiologiques rapides de l’ordre de 20 à 30 %.

    Le PSA est utilisé pour dépister le cancer de prostate. Toutefois, son taux peut s'élever dans d'autres circonstances dont il faudra tenir compte pour l'interpréter.
    Il est habituel de dire que le toucher rectal ou l'échographie endorectale peuvent faire monter le taux de PSA mais cette élévation lorsqu'elle est constatée n'en modifie guère l'interprétation. Dans la mesure du possible, il est préférable pour cette raison d'attendre une dizaine de jours après un tel examen et la prise de sang. De même, l'éjaculation peut faire varier le PSA.
    Par contre la prostatite aiguë, infection de la prostate, peut faire monter de façon parfois très importante, le taux de PSA.

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LE DIAGNOSTIC DE CANCER DE PROSTATE: LES BIOPSIES PROSTATIQUES

    Le diagnostic de cancer de prostate se fera sur des biopsies prostatiques. Celles-ci se font actuellement le plus souvent sous repérage échographique lors d'une échographie endo-rectale où une sonde d'échographie, introduite par l'anus, est placée directement au contact de la prostate par l'intermédiaire de la muqueuse rectale. On effectue ainsi à l'aide d'un dispositif guide-aiguille adapté sur la sonde, plusieurs prélèvements sur les lésions échographiquement suspectes mais également sur le reste de la prostate afin de prouver la tumeur et bien préciser son extension locale. Ces biopsies se font maintenant couramment  sans hospitalisation sous simple anesthésie locale,  en simple consultation mais sous antibioprophylaxie.

    La décision de réaliser des biopsies de prostate (et avant cela de dépister un cancer de prostate) suppose, si un cancer de prostate est effectivement diagnostiqué, que ce diagnostic débouche sur un traitement ou modifie une attitude thérapeutique. Dans le cas contraire c'est un geste inutile, potentiellement dangereux de par son risque infectieux, et psychologiquement discutable (est-ce en effet utile de dire à un patient souvent âgé qu'il a un cancer de prostate mais que l'on ne le traite pas ?).

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LE BILAN D'EXTENSION

    Une fois le diagnostic histologique fait, on réalisera un bilan d'extension qui comprenait très souvent une scintigraphie osseuse au-dessus d'un seuil de PSA, en général 10 ng/ml et un scanner pelvien afin de rechercher l'existence éventuelle de métastases ganglionnaires. Depuis plusieurs années, le bilan local et loco-régional peut être réalisé par une IRM endo-rectale ou pelvienne pour rechercher une éventuelle atteinte capsulaire, des métastases ganglionnaires, et un bilan d'extension général peut être réalisé par une IRM corps entier ou un TEP-TDM à la choline. Ces deux derniers examens restent peu accessibles, peu de structures disposant des équipements nécessaires pour les effectuer.

    Lorsque le taux de PSA est élevé, le risque d'atteinte ganglionnaire devient plus important. Si le bilan d'extension ne montre rien en imagerie, il est alors préférable de vérifier l'état des premiers relais ganglionnaires au niveau des vaisseaux iliaques en effectuant un curage ganglionnaire. Celui-ci peut être fait lors de l'ablation de la prostate si ce traitement est choisi, en débutant l'intervention par le curage ganglionnaire qui est confié immédiatement à l'anatomo-pathologiste en salle d'opération. Celui-ci effectue alors un examen microscopique extemporané pour vérifier l'intégrité ou non des ganglions prélevés et permettre alors, si ceux-ci sont sains, la poursuite de l'intervention. Si le risque d'atteinte est important ou si l'on opte à priori pour une radiothérapie, le curage sera effectué isolément par laparotomie ou par laparoscopie et les ganglions seront alors examinés classiquement.

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LA CLASSIFICATION TNM

    Une fois les biopsies prostatiques et le bilan d'extension réalisés, la tumeur sera classée selon la classification TNM, classification qui code en stades successifs la tumeur primitive locale (T), l'état des ganglions (N comme node) et l'existence d'éventuelles métastases (M). Cette classification peut être affinée après l'ablation de la prostate et alors précédée par la lettre p (comme pathologique).

LES TABLES DE PARTIN - CLASSIFICATION DE D'AMICO

    Pour aider la décision on peut s'aider des tables de Partin. PARTIN est un urologue américain ayant établi en 1997 des tables à double entrée permettant de chiffrer la probabilité pour un patient donné d'avoir une tumeur localisée et donc curable par un traitement local. Ces tables ont été établis en analysant rétrospectivement plus de 4000 patients ayant eu une prostatectomie radicale. Cette probabilité est établie en tenant compte du taux de PSA, du score de Gleason, du stade clinique. On va ainsi pouvoir chiffrer pour une tumeur donnée le risque de laisser évoluer une tumeur curable, ou au contraire d'imposer un traitement dit curateur (donc ces risques de complications) pour une tumeur localement dépassée. Selon ces tables, le risque d'atteinte ganglionnaire est de 4 % si le PSA est inférieur à 4 ng/ml pour une tumeur T1c, dont le score de Gleason est égal à 7. Il monte à 22 % si le PSA est supérieur à 20 ng/ml. D'autres nomogrammes ont été proposé mais restent peu souvent utilisés.

    Pour aider la décision on peut s'aider également de la classification de d'AMICO qui distingue trois groupes de risques en fonction du taux de PSA, du score de Gleason et du stade clinique:
• Faible risque : PSA < 10 ng/ml et score de Gleason <= 6 et stade clinique T1c ou T2a.
• Risque intermédiaire : PSA entre 10 et 20 ng/ml ou score de Gleason 7 ou stade clinique T2b.
• Risque élevé : PSA > 20 ng/ml ou score de Gleason > 7 (8, 9 ou 10) ou stade clinique T2c.

    Plus récemment, un nouveau score, le score CAPRA, permet de définir des groupes à risques et orienter la stratégie de traitement en fonction de l'âge, du taux de PSA, du score de Gleason, du stade clinique et du % de biopsies positives.

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METHODES DE TRAITEMENT

   Plusieurs traitement peuvent s'associer, se succéder.

    LA SURVEILLANCE ACTIVE

    Chez des patients ayant un cancer de la prostate cliniquement localisé à faible ou très faible risque de progression, il est possible de proposer, chez des patients bien informés et demandeurs, une surveillance dite active. Contrairement à l’abstention-surveillance, la surveillance active est une option thérapeutique curative qui retarde l’éventuel moment du traitement en minimisant le risque de devoir traiter une maladie devenue alors localement dépassée. Plusieurs séries prospectives ont validé cette option thérapeutique mais les critères de sélection des patients et les modalités de cette surveillance varient d'une publication à l'autre. Dans tous les cas, la surveillance repose sur des dosages de PSA tous les 3 à 6 mois pour calculer le temps de doublement, un examen clinique, et des biopsies renouvelées entre 3 et 18 mois après la première série de biopsie. L'intérêt de nouvelles série de biopsie ensuite, ou la place de l'IRM dans cette surveillance restent discutés. Les critères d'inclusion dans cette surveillance active comportent en général des patients ayant un stade clinique <= à T2a, un taux de PSA < 10, un score de Gleason à 6, un nombre de biopsies positives < 3 et un % de cancer par carotte positive < 50%. La progression d'un de ces critères lors de la surveillance, fera discuter un traitement curateur.

 

    TRAITEMENTS "CURATEURS"

    Sur les tumeurs localisées à la prostate, on peut avoir recours à un traitement purement local et dont l'objectif est de guérir définitivement en détruisant tout le tissu tumoral. Dans ce but, on peut effectuer une prostatectomie radicale ou faire une radiothérapie "radicale". La prostatectomie consiste en l'ablation complète de la prostate et des vésicules séminales. Le col de la vessie est ensuite suturé à l'urètre pour rétablir la continuité urinaire. C'est une intervention dont les risques ont été considérablement améliorés mais entrainant environ 10 % d'incontinence urinaire et 10 à 90 % d'impuissance. Elle permet l'ablation de la tumeur, un examen histologique complet, une meilleure stadification et une surveillance précise avec le dosage du PSA qui ne doit plus être décelé après ablation de la prostate si toute la tumeur a été enlevée. Une prostatectomie pourra être dans certains cas suivie par un radiothérapie locale si l'extension locale était plus importante que prévue. Cette prostatectomie peut être faite par laparotomie c'est à dire avec une incision abdominale sous l'ombilic mais également par coelioscopie en introduisant des instruments adaptés par des trocards passés à travers la peau. Plus récemment le développement de la robotique permet de faire ce type d'intervention par coelioscopie à l'aide d'un robot mais sans qu'il ne soit démontré un avantage en terme de séquelles ou de résultat sur le plan carcinologique: son coût reste par contre encore très supérieur aux tarifs de remboursement de l'assurance maladie.

    La radiothérapie évite une intervention mais doit s'étaler sur plusieurs semaines afin d'en limiter ses effets secondaires. Il peut apparaître en effet des lésions radiques vésicales ou rectales dans 10 à 15 % des cas. Le risque d'incontinence est plus faible qu'après prostatectomie mais non nul (5 à 10 %) et le taux d'impuissance est également nettement moindre (de l'ordre de 30 à 40 %) mais tend à se détériorer dans les années suivantes. La radiothérapie va contre-indiquer en règle générale, une prostatectomie ultérieure en cas d'échec, du fait des risques per-opératoires et séquellaires qu'elle majore.

 

    D'autres techniques de traitement sont disponibles et/ou en cours de validation:

- la curiethérapie: elle consiste en la mise en place définitive de petits grains radioactifs dans la prostate, le plus souvent d'Iode 125. Ces particules sont implantées par le périné, sous anesthésie au bloc opératoire selon une répartition définie au préalable par un programme informatique de dosimétrie, et sous contrôle échographique. Ces grains vont ensuite perdre progressivement leur radioactivité selon leur période radioactive. La demi-vie de l'iode 125 est par exemple de 57 jours. Si un geste local est nécessaire devant la survenue d'une rétention vésicale notamment, il sera alors nécessaire d'attendre plusieurs mois, que les grains aient perdu l'essentiel de leur radioactivité, avant d'envisager une résection endoscopique de l'obstacle cervico-prostatique. Cette technique nécessite une hospitalisation courte de 24 heures et son taux de complications est faible (irritation urinaire, digestive, rétention vésicale, impuissance, rectite radique). Sa place exacte dans l'arsenal thérapeutique est mieux définie et les recommandation de l'AFU (Association Française d'Urologie) recommandent au même titre qu'une prostatectomie, une curietherapie pour les stade T2a, bien différencié Gleason 6, dont le PSA est inférieur à 10 et pour un volume prostatique inférieur à 50 grammes.

- les ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU: machine Ablatherm® ou Focal One®). Cette technique utilise des ultrasons focalisés par voie transrectale. Les ultra-sons vont provoquer une nécrose de coagulation par effet thermique et par effet de cavitation. Le repérage est effectué par échographie et un logiciel va permettre de définir le volume cible à traiter, vérifier l'absence d'échauffement anormal des tissus adjacents en particulier la muqueuse rectale. La scéance se déroule sous anesthésie générale ou rachianesthésie. Cette technique est limitée actuellement par le volume de la prostate: en cas d'adénome associé, une résection endoscopique de celui-ci devra être effectué au préalable ou en premier temps de la procédure de traitement. Son efficacité et ses résultats sont en cours d'évaluation mais cette technique n'est pas encore recommandée en première intention en l'absence de contre-indication chez un patient pouvant bénéficier d'une radiothérapie ou une prostatectomie. Une étude multicentrique française a débutée en 2015 pour la faire valider auprès de l'Assurance Maladie comme un traitement curateur du cancer de prostate localisé.

- la crythérapie, agissant non pas par la chaleur mais par cryodestruction des tissus. Encore actuellement peu utilisée, sa place reste à évaluer et mieux définir.

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    TRAITEMENTS PALLIATIFS

   Le traitement hormonal a été le premier traitement efficace sur cette tumeur. En effet, le cancer de prostate est un cancer hormonodépendant. La suppression de l'effet de la testostérone, hormone mâle sécrétée par certaines cellules testiculaires le fait involuer. Cette action peut être obtenue en supprimant la fabrication de la testostérone par le testicule soit en effectuant une castration ou pulpectomie chirurgicale, soit en utilisant un traitement médical par injections régulières tous les un, trois et depuis peu 6 mois d'analogues de la LH-RH (Décapeptyl®, Zoladex®, Enantone®, Eligard®). Ces analogues agissent sur l'hypophyse, en freinant la synthèse de la LH, peptide stimulant de la sécrétion de testostérone par le testicule. Il existe également un antagoniste de la LH-RH qui provoque une castration chimique en évitant la stimulation de sécrétion de testostérone pendant les premières semaines de traitement par les analogues de la LH-RH (Firmagon®). A côté de ces méthodes reproduisant une castration (chirurgicale ou chimique), on peut utiliser des anti-androgènes (Eulexine®, Anandron®, Casodex®) dont le but est de bloquer les récepteurs cellulaires prostatiques à la testostérone. Le traitement hormonal (plus exactement anti-hormonal), peut être utilisé en continu ou de façon intermittente. Environ 80 à 90 % des cancers sont hormonodépendants d'emblée mais 80 % des cancers hormono-dépendants deviendront résistants à ce traitement lors du suivi. On parle alors d'échappement au traitement hormonal. Vont prochainement être disponibles des antagonistes de la LH-RH.

    Dans certains cas, en cas d'obstruction urétrale par la tumeur il pourra être nécessaire dans l'évolution d'un cancer de prostate de faire une résection endoscopique dont le but n'est pas de guérir mais de lever un obstacle empéchant le bon écoulement des urines et pouvant entraîner un blocage vésical. Parfois l'obstruction d'un ou des deux orifices urétéraux au-dessus de la prostate par la tumeur justifiera la mise en place de sondes doubles J avec ou sans résection endoscopique de la tumeur. Plus rarement il peut être nécessaire de dériver à la peau les urines, directement au niveau rénal par une néphrostomie per-cutanée, ou en réalisant une urétérostomie cutanée.

    La radiothérapie métabolique par injection intra-veineuse de strontium radioactif est un traitement palliatif destiné au traitement des métastases multiples et douloureuses. Le strontium radioactif de par son tropisme osseux va se fixer électivement sur les métastases osseuses et permettre ainsi d'en diminuer la taille et donc le caractère douloureux. Ce type de traitement est efficace souvent plusieurs mois mais nécessite des taux de plaquettes et globules blancs suffisant, car risque d'altérer la production par la moelle osseuse de ces éléments.

    De nouvelles molécules d'hormonothérapie viennent en relais du blocage hormonal par analogue de la LH-RH +/- anti-androgène. Il s'agit de l'abiratérone (Zytiga®), utilisé dans les cancers métastatiques résistants à la castration, et plus récemment l'enzalutamide (Xtandi®). Leurs effets secondaires possibles justifient une surveillance clinique et biologiques rapprochée.

    La chimiothérapie n'a actuellement pas de place en première intention en dehors des formes métastatiques et hormono-résistantes d'emblée. L' arrivée des taxanes et en particulier du Taxotère®, a permis d'améliorer significativement les résultats de molécules jusqu'à présent disponibles et peu efficaces. Une nouvelle taxane, la cabazitaxel (Jevtana®) se place en chimiothérapie de seconde ligne. Les résultats malgré tout non décisifs de la chimiothérapie s'expliquent en partie par la lenteur d'évolution de ces tumeur liée à un temps de doublement long d'environ 2 ans initialement. Sont en cours d'évaluation les antiangiogéniques, molécules agissant en freinant l'angiogénèse (développement de nouveaux vaisseaux sanguins) nécessaire au développement des tumeurs pour assurer leur développement. Cette famille de molécule est actuellement utilisée dans le cancer du rein avec des résultats très significatifs

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DECISION THERAPEUTIQUE

    La vitesse d'évolution lente, l'âge de découverte souvent tardif doivent faire envisager tout traitement avec prudence. En effet dans bon nombre de cas, le but recherché dans la prise en charge ne doit pas être la suppression à tout prix de la tumeur, mais maintenir un confort et une qualité de vie normale, une autre affection en particulier cardio-vasculaire dominant le pronostic vital bien souvent.

    Le traitement du cancer de prostate varie en fonction de l'âge, de l'étendue locale ou à distance de la tumeur et des éventuelles pathologies associées notamment cardio-vasculaires, neurologiques,...

    Les indications du traitement sont essentiellement fonction de l'âge du patient ou plus exactement de son "espérance de vie", et de l'importance de la tumeur, c'est à dire de son stade mais également de son grade histologique (score de Gleason). En effet une petite tumeur localisée découverte après 75 ans, ou chez un patient plus jeune mais dont l'espérance de vie est de moins de 10 ans de part d'autres affections associées (cardiaques notamment) ne justifiera le plus souvent qu'une simple surveillance. Comme indiqué précédemment, il s'agit de tumeur d'évolution le plus souvent très lente et ce n'est que devant l'apparition de symptômes ou devant une évolution anormalement rapide que l'on pourra proposer un traitement médical. A l'inverse devant une petite lésion découverte avant 72 à 75 ans chez un patient en bon état général et pour lequel l'espérance de vie est supérieure à 10/15 ans, un traitement radical type prostatectomie ou radiothérapie pourra être envisagé. Entre ces deux âges et toujours pour une tumeur localisée, la décision n'a rien d'univoque et sera discutée au cas par cas avec le patient, en tenant compte des résultats histologiques, du bilan local, de son souhait ou non de conserver une activité sexuelle, etc ....

    Pour résumer les recommandations actuelles:
    - dans les stades localisés:
      . ayant une espérance de vie de plus de 10 ans: surveillance si stade T1a (sans grade 4 dans le score de gleason), prostatectomie radicale, curiethérapie, radiothérapie si plus de 70 à 75 ans ou si contre-indication à la chirurgie ou si souhait du patient.
      . ayant une espérance de vie inférieure à 10 ans: surveillance puis hormonothérapie si la tumeur progresse, ou radiothérapie +/- hormonothérapie si l'espérance de vie est de plus de 5 ans avec un mauvaise différenciation histologique.
    - dans les stades localements avancés:
      . ayant une espérance de vie supérieure à 10 ans: peuvent se discuter une association radiothérapie et hormonothérapie, une prostatectomie avec ou sans hormonothérapie, ou radiothérapie.
      . ayant une espérence de vie de moins de 10 ans: surveillance et hormonothérapie selon la vitesse de progression, ou hormonothérapie d'emblée.

    Les tumeurs d'emblée métastatiques ne relèvent quant à elles que d'un traitement médical hormonal. La prostatectomie ou la radiothérapie sont alors inutiles et n'apportent que leurs complications respectives sans aucun avantage en terme de survie ou qualité de vie. Une résection endoscopique ou une dérivation du haut appareil pourront s'avèrer nécessaires selon l'évolution locale pour reperméabiliser l'urètre ou les uretères. Parfois pourra se discuter une radiothérapie locale freinatrice lors d'évolution locale obstructive.

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RESULTATS

    La survie spécifique à 10 ans des patients traités par prostatectomie radicale est de 90 % environ pour les tumeurs inta-capsulaires (rapport ANAES 2001). Elle est de 70 % pour la radiothérapie externe conventionnelle. Il ne semble pas exister, selon ce rapport, de preuve d'efficacité supérieure d'une technique de radiothérapie par rapport à une autre. Le contrôle tumoral à 5 ans après HIFU était d'environ 60 % sur les premières études publiées. Ces résultats méritent donc d'être précisés et validés.

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SURVEILLANCE ACTIVE

     Le dépistage mais surtout le traitement du cancer de la prostate doit avoir pour but de traiter les patients qui risquent d'en souffrir et pour certains en décéder, mais éviter de traiter ceux porteur d'une tumeur dite latente ou non significative qui n'aurait très probablement pas fait parler d'elle jusqu'au décès de l'individu d'une tout autre cause que de cette tumeur.

    La difficulté, en l'absence d'éléments ou de marqueurs pronostics suffisamment précis pour répondre à cette question, est donc de caractériser les formes latentes et celles nécessitant une prise en charge plus active car plus agressives.

    Il est proposé une surveillance active chez les patients présentant un cancer localisé à faible risque évolutif T1- T2a, dont le PSA initial est inférieur à 10 ng/ml, dont le Score de Gleason des biopsies est = 6 et en l'absence de grade 4, avec moins de 3 biopsies positives (sur au moins 6 biopsies réalisées) et moins de 50% de tumeur sur chaque biopsie envahie. Une seconde série de biopsie est le plus souvent proposée pour confirmer les critères histologiques initiaux. Un traitement actif sera proposé en cas d'évolution de l'un des critères ci-dessus ou sur la demande du patient, la surveillance active pouvant générer chez certains une anxiété compréhensible.

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DEPISTAGE DE MASSE ?

Pour être justifié, l’OMS définit pour un dépistage de masse, des critères d’ordre médicaux et économiques :
    La maladie doit représenter un important problème de santé publique.
    La maladie doit pouvoir être diagnostiquée à un stade précoce.
    L’histoire naturelle de cette maladie doit être connue du stade latent au stade clinique.
    Il doit exister un traitement efficace pour les patients atteints de cette maladie.
    Il doit exister un test performant pour le dépistage.
    Ce test doit être acceptable pour la population.
    Le dépistage doit apporter un bénéfice en terme de santé publique, et ce bénéfice doit être analysé en intégrant les facteurs économiques (a-t-on les moyens de le mettre en œuvre ?).

    Si l’on analyse, dans le cadre dépistage du cancer de prostate par le dosage du PSA ces différents critères, l’actuelle recommandation du non intérêt du dépistage de masse du cancer de prostate trouve des arguments
        - L’incidence du cancer de prostate, très liée à l’âge, est en augmentation, mais la mortalité spécifique de ce cancer semble augmenter moins vite que son incidence. L’impact en terme d’années de vie perdues est donc nettement moins important que pour d’autres cancers atteignant des populations plus jeunes (poumon, colon, sein,..). L’augmentation de l’incidence porte surtout sur les formes localisées. Le cancer de prostate est donc un problème de santé publique mais moins important que ne le laisserait supposer son incidence élevée.
        - Le cancer de prostate peut être diagnostiqué à un stade latent par la réalisation de biopsies prostatiques échoguidées par voie transrectale. Toutefois, la prévalence de cette affection n’étant que très mal connue (en dehors de séries autopsiques), la valeur de ce test diagnostique reste mal connue.
        - L’histoire naturelle de la maladie demeure mal connue. La progression du cancer de prostate apparaît très lente. Il a été estimé que si 30 à 40 % des hommes de plus de 50 ans étaient porteurs d’un cancer de prostate, 8 à 9 % deviendrait « cliniquement significatifs » et moins de 5 % ont une probabilité d’en décéder. Cet argument va donc contre un dépistage de masse qui ferais « surtraiter » la plupart des cancers de prostate diagnostiqués par le dépistage systématique, tant que nous n’auront pas des éléments cliniques, biologiques et histologiques fiables qui permettrons de distinguer ceux qui évolueront vers une progression létale et ceux qui resteront asymptomatiques.
        - Il doit exister un traitement efficace pour les patients atteints de cette maladie. Actuellement, il est difficile de trancher de façon irréfutable mais les études par modélisation mathématiques sont en faveur d’un traitement radical par prostatectomie ou radiothérapie devant un cancer localisé de la prostate peu ou moyennement différencié, chez un patient de moins de 70 ans, plutôt qu’à une attitude de surveillance et traitement différé. Une étude de Lu-Yao en 1997 conclut en un avantage pour la prostatectomie lorsque le grade de la tumeur augmente. La survie spécifique à 10 ans des patients dont la tumeur est intra-capsulaire et traités par prostatectomie radicale est de 90 %, soit au moins équivalente à celle d’hommes d’âges équivalents dans la population générale. La surveillance avec traitement différé lors de l’apparition de symptômes est l’attitude raisonnable devant une petite tumeur, de faible grade survenant chez un patient ayant une espérance de vie inférieure à 10 ans.
        - Il doit exister un test performant pour le dépistage. L’association dosage du PSA et toucher rectal semble la plus performante. Toutefois le dosage du PSA, non spécifique du cancer, pose des problème de variabilité selon les méthodes utilisées, la définition d’une valeur seuil étant essentielle pour définir la valeur d’un test. Dans le cadre d’un dépistage l’association TR et PSA détecte un cancer de prostate dans 5,8 % des cas (Catalona, 1994). Le PSA seul détecte 3 à 4,6 % de cancer de prostate. La stratégie optimale reste à définir en tenant compte des critères économiques.
        - Ce test doit être acceptable pour la population. Or si le dosage du PSA et le toucher rectal semblent acceptables, il semble que pour des hommes faisant l’objet d’une campagne de dépistage systématique, après information concernant les risques liés au cancer de prostate et les effets secondaires des traitements, ceux-ci refusent souvent le dépistage ou sont incapables de prendre une décision de choix de traitement en cas de découverte d’un cancer.

    Ces éléments ayant fait l’objet d’un rapport de l’ANAES en mai 1998 permettaient donc de conclure qu’ il semblait non recommandé d’envisager un dépistage de masse, donc systématique. Il faut toutefois noter que ces recommandations découlaient essentiellement de l’absence de données comparatives et statistiquement significatives permettant de conclure de façon nette et sans ambiguités entre les différentes attitudes thérapeutiques. Plusieurs études internationnales sont en cours pour tenter de préciser l'intérêt actuel d'un dépistage de masse du cancer de prostate mais les résultats ne sont pas encore disponibles. En 2004, le rapport de l’HAS sur les éléments d’information des hommes envisageant la réalisation d’un dépistage individuel du cancer de prostate stipulait que « les résultats des études portant sur le dépistage systématique ne permettent pas de conclure sur l’opportunité d’un dépistage mais perçoit néanmoins sur des arguments indirects qu’une démarche de dépistage individuel, non systématisée, pourrait dans certains cas apporter un bénéfice individuel au patient. En effet : bil existe des facteurs de risque potentiels, il existe un test de diagnostic précoce, la réalisation du dépistage peut, s’il est négatif, rassurer les hommes ayant des facteurs de risque et enfin un traitement curatif pourrait augmenter la survie spécifique et dans certains cas améliorer le pronostic individuel. »

    En l'état actuel, il semble admis que:
     - seul le dépistage permet le diagnostic d'un cancer de prostate au stade localisé donc curable et donc la diminution du risque de décès lié au cancer de prostate. Un cancer de prostate diagnostiqué avant 65 ans, tue 3 fois sur 4 s'il n'est pas traité.
     - le dépistage ne doit s'adresser qu'aux hommes dont l'âge justifie un éventuel traitement curateur soit entre 50 et 75 ans, et aux hommes prêts à en accepter les conséquences.
Depuis 2003, l’Association française d’urologie (AFU) recommande un dépistage individuel du cancer de prostate assorti d’une information sur les bénéfices et incertitudes concernant le dépistage et les effets secondaires des traitements induits.
     - le dépistage doit être plus précoce (à partir de 45 ans) chez les hommes à risque c'est à dire ayant au moins 2 parents proches atteint d'un cancer de prostate ou d'origine antillaise ou africaine.
     - le dépistage associe un dosage du PSA et un toucher rectal (15 % des cancers de prostates sont révélés par un toucher rectal anormal malgré un PSA normal). La valeur seuil du PSA est actuellement fixée à 4 ng/ml mais il est discuté d'en abaisser la valeur.

    Le résultat de deux grandes études randomisées (PLCO aux USA et ERSPC en Europe a donné lieu à de nouvelles discussion en 2012 sur l'intérêt du dépistage de masse du cancer de la prostate. En 2012, l’HAS a souligné l’absence d’intérêt démontré de la mise en oeuvre d’un dépistage systématique organisé par dosage du PSA dans une population d’hommes considérés à haut risque, comme elle l’avait déjà signifiée pour la population générale. L'étude ERSPC portant sur 180 000 hommes et donc la méthodologie était supérieure à l'étude PLCO, démontre un bénéfice en termes de survie spécifique de 21 % à 11 ans chez les hommes de 55 à 69 ans et une diminution de 41 % du risque de métastases dans le groupe dépisté mais au prix d'un risque de surtraitement. L’AFU (Association Française d'Urologie) recommande une détection précoce individualisée du cancer de la prostate avec une information éclairée sur les modalités, les enjeux et les risques éventuels liés aux différentes stratégies de prise en charge avec pour objectif essentiel de ne pas méconnaître un cancer agressif.

      Les résultats de deux études à grande échelle vont probablement modifier ces recommandations (étude PLCO aux USA et ERSPC en Europe). L’étude ERSPC est la première grande étude randomisée qui met en évidence un impact bénéfique du dépistage sur la mortalité spécifique (de l'ordre de 25 à 30%) du cancer de la prostate. D’un point de vue méthodologique, cette étude (portant sur 180 000 hommes) est supérieure à l’étude PLCO.

     L'impact financier d'un dépistage de masse reste à mieux évaluer.

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DEPISTAGE INDIVIDUEL CHEZ UN PATIENT ASYMPTOMATIQUE

    Le dépistage individuel reste de ce fait parfaitement justifiable pour un patient donné. S’il est demandé dans le cadre d’un dépistage même individuel, il est logique de considérer qu’un résultat anormal doit déboucher sur la réalisation de biopsies et un éventuel traitement radical si celles-ci révèlent une tumeur maligne. Il doit donc être fait dans l’intention de traiter radicalement et doit par conséquent s’adresser aux patients susceptibles d’être traités de cette façon donc ceux ayant une espérance de vie de plus de 10 ans.

    En pratique, ce dépistage peut être proposé chez les hommes de 50 à 70 mais bientôt de 75 ans, ce d’autant qu’ils ont plusieurs antécédents familiaux de cancer de prostate. La périodicité du contrôle ultérieur lorsque le résultat initial est normal  reste empirique mais il est logique de considérer qu’un délai d’un à 2 ans est suffisant compte tenu du temps de doublement de cette tumeur. Si les résultats du toucher rectal et du PSA sont normaux, si tumeur il existe, celle-ci reste d’un volume non significatif et après doublement soit en moyenne 2 ans, elle a toute probabilité de rester localisée donc de pouvoir être traitée de façon curatrice si le terrain le permet.

    La « normalité » ou « l’anormalité» du résultat du dosage du PSA dépend certes du seuil du kit de dosage utilisé par le laboratoire (ces seuils étant différents d’une technique à l’autre mais le seuil de 4 ng/ml est généralement retenu) mais également d’autres éléments qui permettent d’interprèter et affiner ce taux en diminuant le nombre de faux négatifs et en améliorant sa valeur prédictive positive.

    Le PSA subit chez un même individu des variations physiologique rapides de l’ordre de 20 à 30 %. D’autre part le taux est corrélé à l’âge du patient probablement du fait du développement d’une hypertrophie prostatique bénigne donc de l’augmentation de volume de la glande. La vélocité du PSA ou pente de croissance du PSA fait intervenir la différence de  croissance donc de concentration sérique du PSA entre le tissu tumoral et le tissu normal ou adénomateux. Une élévation de plus de 0,75 ng/ml/an a été proposé comme seuil mais l’apport de cette variable n’a pas été statistiquement démontré même si elle paraît a priori intéressante. De même, la densité du PSA soit le rapport entre le taux du PSA et la taille de la glande (ou de la zone transitionnelle pour certains) a été proposé, le tissu néoplasique ayant relarguant concentration sérique de PSA de l’ordre de 3 ng/ml par grammes de tumeur alors que le tissu normal ou adénomateux ne produit que 0,3 ng/ml/g soit 10 fois moins.

    Le dosage du PSA libre permet d’affiner un dosage « limite » entre 4  et 10 ng/m. En effet, la proportion de PSA libre diminue dans les cancers de prostate et un rapport PSA libre/total bas (< 15 %) pour un taux total situé entre 4 et 10 ng/ml poussera si le contexte s’y prête, à la réalisation de biopsies.

    Aucun de ces indicateurs n’étant suffisamment performant à lui seul, c’est en pratique l’ensemble de ces éléments sans oublier le patient et ses inquiétudes qui modifieront l’attitude et rendent le suivi d’algorythmes décisionnels parfois difficile à suivre à la lettre. Si l’on veut rester schématique :
        - après 75 ans : le PSA est utile si l’on suspecte un cancer de prostate associé à une hyperplasie et dont l’existence et l’importance modifierais le traitement global.
        - Avant 70 ans, et en l’absence de facteur de comorbidité abaissant l’espérance de vie à moins de 10 ans, et en l’absence d’anomalie suspecte au toucher rectal :
            o un PSA supérieur à 10 ng/ml en dehors d’un contexte infectieux,
            o et/ou un PSA entre 4 et 10 ng/ml avec un rapport PSA L/T inférieur à 10 %
            o et/ou un PSA dont l’évolution est anormalement rapide (de plus de 0,75 ng/ml/an),
            o et/ou une densité de PSA supérieure à 0,25 ng/ml/g,
    doivent faire discuter la réalisation de biopsies prostatiques ou au minimum une surveillance clinique et du PSA dont le rythme peut également se discuter. Un contrôle 6 mois plus tard paraît être un bon compromis.

    Lorsque des biopsies ont été réalisées devant une anomalie au toucher rectal, ou sur un PSA anormal, si celles-ci s’avèrent normales, il est alors préférable de recontrôler le PSA, 6 à 12 mois plus tard. Si le taux continue sa progression, peut se discuter une nouvelle série de biopsies que l’on réalisera alors plutôt sous anesthésie afin d’augmenter le nombre de prélèvements, en y associant éventuellement la résection endoscopique d’un adénome si celui-ci est d’un volume significatif dans l’hypothèse d’une lésion dans la zone transitionnelle. Si ces nouvelles biopsies ne montrent pas de lésion tumorale, il est alors peu utile de refaire des biopsies à court et moyen terme.

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Documents annexes:

- Les traitements du cancer de la prostate (édité par l'INCA: Institut National du Cancer et la Ligue Nationale contre le Cancer sur le site Cancer info).
- Guide de dialogue et d'information à l'usage des personnes malades et de leur proches. (édité par l'Association Française d'Urologie et par la Féfération Nationale des Centres de Lutte contre le cancer).

 

Docteur B. d'ACREMONT - Mise à jour le 31 janvier 2016