LES URETRITES

 

Sommaire

Définition
Etiologies - microbiologie
Le tableau clinique
Evolution
Examen complémentaires
Traitements

DEFINITION

    L'urétrite est une inflammation de l'urètre, le plus souvent d'origine infectieuse (plus rarement parasitaire, mécanique, virale).
    La plupart des urétrites sont des maladies sexuellement transmissibles. Elles ont vu leur incidence diminuer lors de l'apparition de l'épidémie de SIDA mais on constate depuis 1998 une recrudescence de ces infections.
     C'est habituellement une infection aiguë mais elle peut être plus atténuée, subaiguë voire chronique.

ETIOLOGIES - MICROBIOLOGIE

    L'urètre, par son extrémité (méat et fossette naviculaire) est en communication avec l'extérieur. Comme pour d'autres cavités, celle-ci est occupée en permanence par un flore microbienne (comme la peau, la bouche, le vagin,...). Si les prélèvements bactériologiques effectués à ce niveau mettent en évidence un germe, il est donc important de tenir compte de cette donnée car tout germe n'est pas systématiquement pathogène lorsqu'il est retrouvé au niveau de l'urètre (on parle alors de germes saprophytes): il faudra donc pour parler d'infection, tenir compte de son type, de sa quantité, des signes cliniques, etc.

     Les germes pathogènes habituellement en causes sont:

      - des germes sexuellement transmissibles, le plus souvent:
        . gonocoque (Neisseria gonorhae), responsable de la blennorragie gonococcique ou gonorrhée. Elle touche surtout l'adulte jeune et peut être contractée lors de relations génito-génitales mais également oro-génitales ou génito-anales. Son incubation est courte de l'ordre de 2 à 5 jours après le rapport contaminant.
        . chlamydia trachomatis, le plus fréquent des germes d'urétrites non gonococciques (40 % dans les pays développés, et en valeur absolue 4 fois le nombre d'infections gonococciques masculines), elle touche deux fois plus souvent les femmes. Sa période d'incubation est plus longue, environ 2 à 3 semaines. L'urétrite à Chlamydia est habituellement moins aiguë qu'avec le gonocoque. Ces infections sur l'appareil génital féminin peut parfois entraîner, négligées, une stérilité par obstruction de trompes de Fallope, complication majeure de cette infection chez la femme.
        . mycoplasmes et uréaplasma uréalyticum: leur rôle pathogène est parfois difficile à affirmer. Peuvent toutefois être à l'origine d'urétrite, uréaplasma uréalyticum et plus récemment incriminé mycoplasma genitallium. Ce dernier, très difficilement cultivable est objectivé en PCR sur le 1er jet d'urine. Il pourrait être responsable de 15 à 25 % des urétrites non gonococciques et serait l'un des principaux responsables des urétrites récidivantes et/ou chroniques.

      - des mycoses: candida albicans, rarement à l'origine d'urétrite et alors plus souvent subaiguë, il est surtout responsable de balanites ou balano-posthites (infection du gland et du prépuce) chez l'homme et de vulvo-vaginites chez la femme.

      - des parasites: trichomonas vaginalis, protozoaire flagellé, dont le diagnostic repose sur la mise en évidence du parasite à l'examen direct.

      - des virus: herpes virus qui s'il se localise sur la partie terminale de l'urètre peut simuler une infection à gonocoque ou chlamydia. Il guérit spontanément en une semaine mais récidive souvent comme dans ses autres localisations possibles.

      - des germes non sexuellement transmissibles: Streptocoque, Staphylocoque, E. Coli, Klebsielle,.. La découverte de tels germes sur un prélèvement urétral doit rendre prudent sur leur rôle exact. En effet pour parler d'infection urétrale "vraie" il faut avoir un taux de germe suffisant mais également un nombre de leucocytes important (pus) témoignant de la réaction inflammatoire générée par le germe "agresseur". Il s'agit souvent de germes de surinfection sur des urètres cicatriciels, ou ayant présenté des infections récidivantes et /ou mal traitées.

     - cadre particulier souvent désespérant pour le patient et son médecin, les urétrites "amicrobiennes" dans lesquelles aucun germe n'a pu être retrouvé sur les examens bactériologiques. Elles peuvent être liées à un germe non encore connu ou non détectable à ce jour. La détection récente du mycoplasma genitallium en est un exemple. Mais elles peuvent être aussi liées à la persistance d'une inflammation après une urétrite qui laisse ainsi parfois pendant plusieurs mois des symptômes fluctuants heureusement souvent plus atténués qu'en période aiguë ("urétrites chroniques").

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LE TABLEAU CLINIQUE:

    Il associe dans le forme aiguë typique:
     - un écoulement d'aspect variable (classiquement purulent jaunâtre ou jaune verdâtre dans la gonococcie, souvent moins abondant et plus clair dans les infections à Chlamydiae) et qui vient tâcher les sous-vêtements.
      - des brûlures en urinant ("chaude-pisse", "pisser des lames de rasoirs",..)
      - sans fièvre
      - avec à l'examen un méat urinaire rouge, tuméfié dans lequel on retrouve les sécrétions.

    Parfois ce tableau très évocateur est plus nuancé:
      - formes asymptomatiques, rares, elles doivent faire souvent traiter l'ensemble des partenaires d'un sujet atteint d'une maladie sexuellement transmissible.
      - moins inhabituelles, les formes plus atténués ou l'écoulement est peu abondant, clair.
      - parfois il est possible de palper des ganglions au niveau des aines.
      - enfin peuvent être associées d'autres localisations :
       . ano-rectale ou bucco-pharyngée pour le gonocoque.
       . chez la femme, l'infection à gonocoque est le plus souvent cervico-vaginale, responsable d'écoulement vaginaux (leucorrhées), d'une dyspareunie (douleurs lors des rapports), de démangeaisons au niveau de la vulve, d'une pollakiurie liée à l'atteinte urétrale associée.
      - enfin citons le contamination du nouveau-né lors de l'accouchement si la mère est elle-même infectée. Cette atteinte se fait au niveau des conjonctives des yeux et se manifeste par une conjonctivite bilatérale purulente qui peut conduite à la cécité. Elle est prévenue systématiquement par l'instillation conjonctivale d'un antiseptique ou antibiotique à la naissance.

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EVOLUTION

    Négligée ou traitée avec retard, une urétrite peut se compliquer chez l'homme par une épididymite se traduisant par l'apparition d'une grosse bourse douloureuse, indurée, rouge associée à de la fièvre, plus rarement une prostatite et parfois, surtout dans les urétrites récidivantes, par l'apparition d'un rétrécissement séquellaire de l'urètre.
    Parfois le patient continue à présenter de petites douleurs urétrales ou une gène urétrale mal systématisée. Il peut persister un écoulement très variable en abondance, en consistance et selon les jours. Cette symptomatologie est souvent influencée par le régime suivi et se majore habituellement lors de la prise d'alcool, notamment de bière, d'épices, d'asperges,.. On parle alors d'urétrite chronique qui justifiera une enquête bactériologique plus approfondie et la recherche de foyers infectieux profonds, d'une sténose urétrale,.. tableau dont il est difficile d'affirmer la nature infectieuse persistante (justifiant alors des traitements antibiotiques), ou s'il s'agit d'un état inflammatoire "séquellaire" dont le traitement est alors plus symptomatique et mal codifié. Enfin certains patients peuvent entretenir involontairement l'irritation urétrale par peur d'une infection contagieuse en pressant répétitivement la verge et l'urètre pour chercher un écoulement. Ils irritent ainsi les glandes para-urétrales qui réagissent en sécrétant anormalement (sécrétions claires, muqueuses), entretenant ainsi leur anxiété,...
    Chez la femme, l'infection cervicale peut entraîner une salpingite et plus rarement une diffusion au petit bassin en évoluant vers une péritonite pelvienne entraînant alors fièvre, douleurs pelviennes intenses, hyperleucocytose sur la numération sanguine. L'atteinte des trompes peut entrainer une obstruction de celles-ci qui si elle est bilatérale risque de conduire à une stérilité ou favoriser une grossesse extra-utérine. Dans certains cas, une atteinte péri-hépatique peut être retrouvée et entrainer alors des douleurs à la partie droite et haute de l'abdomen (hypocondre droit), de la fièvre et faire évoquer à tort le diagnostic d'infection de la vésicule biliaire (cholécystite aiguë).
    Plus spécifique à Chlamydia Thachomatis, on peut observer plusieurs semaines après l'infection elle-même, l'apparition d'une arthrite réactionnelle dont le mécanisme n'est pas encore bien clarifié ainsi que d'une atteinte de la conjonctive de l'oeil (syndrome de Fiessenger-Leroy-Reiter).
     

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EXAMENS COMPLEMENTAIRES

    L'examen principal est le prélèvement bactériologique urétral. Il consiste à prélever par raclage (à l'aide d'un écouvillon) les sécrétions et cellules superficielles sur les tous derniers centimètres de l'urètre. Ces prélèvements font ensuite l'objet d'un examen direct peut performant en dehors des infections à gonocoque, et d'une mise en culture sur des milieux adaptés et spécifiques. Cet examen direct va quantifier également le nombre de polynucléaires (qui doit être supérieur à 5 par champ avec un grossissement x 100 pour parler d'urétrite). La mise en évidence par culture d'infection à chlamydia ou mycoplasmes demande 4 à 7 jours avec une très bonne spécificité mais une sensibilité de l'ordre de 80 %. C'est de plus un examen couteux et difficile. Le prélèvement urétral sera complèté lorsqu'il est positif par la réalisation d'un antibiogramme qui va tester la sensibilité du germe retrouvé aux différents antibiotiques utilisables. On a pu proposer lorsque l'écoulement était peu important, des techniques de "réactivation" supposées améliorer le rendement du prélèvement urétral en demandant au patient de boire de la bière, ou en faisant la veille de l'examen une injection intra-urétrale de nitrate d'argent dilué.
    Pour améliorer la rapidité des résultats, et pour remplacer les techniques de recherche par immunofluorescence à l'aide d'anticorps monoclonaux qui avaient une faible sensibilité, on utilise maintenant les techniques d'amplifications génique par PCR (Polymerase chain reaction) ou LCR (Ligase chain reaction). Ces techniques peuvent se faire sur un prélèvement urétral mais également sur le premier jet d'urine avec une excellente spécificité et une sensibilité de l'ordre de 90 % chez l'homme, un peu moins chez la femme. Les résultats sont obtenus dans les 24 heures.
    Plus que la recherche d'anticorps spécifiques sur les germes d'urétrites, une sérologie HIV, hépatitique B, syphilitique est souhaitable pour rechercher une infection multiple.

    Plus rarement pratiqués sauf dans certaines situations cliniques particulières:
    - la sérologie chlamydiae (et mycoplasme) qui consiste à doser dans le sang la présence d'anticorps anti-chlamydia, présence témoin d'une réaction de l'organisme à ce germe. Une telle séroconversion est rare et peu importante dans l'urétrite. De plus cette présence si elle existe ne permet pas de préciser l'évolutivité et l'ancienneté de l'infection. C'est donc un examen qui n'a que très peu d'intérêt dans le cadre des urétrites. Une prise de sang peut par contre être très souhaitable pour effectuer une sérologie HIV, hépatite ou syphilis du fait de la fréquence d'infections simultanées multiples.
    - la spermoculture, qui sera parfois utile dans certaines prostatites chroniques,..
    - une urétrographie rétrograde: utile au décours de l'infection à la recherche d'un rétrecissement urétral si les signes cliniques résiduels l'évoquent.

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TRAITEMENT

   Il repose sur un traitement antibiotique. Il s'adresse au (ou à la) patient(e) atteint(e) mais impose une recherche et par prudence souvent un traitement systématique et simultané de la ou des partenaires. Les rapports sont à éviter et sont de plus souvent douloureux pendant cette période d'infection et en début de traitement. Ils ne doivent se faire qu'avec préservatifs pendant cette période. En cas d'échec du traitement penser à une recontamination (d'où l'importance de traiter tous les partenaires). Rappelons également l'importance du dépistage d'autres MST (VIH, hépatite, syphilis).

   Traitement de l'urétrite à gonocoques non compliquées:
   - ceftriaxone (Rocéphine) en une injection intramusculaire unique de 125 à 500 mg. C'est le traitement de référence. Il est utilisable chez la femme enceinte.
    - ciprofloxacine (Uniflox) en une prise unique orale de 500 mg.
    - ofloxacine (Oflocet) en une prise unique orale de 400 mg.
    - céfixime (Oroken) en une prise orale unique de 400 mg.
    - spectinomycine (Trobicine) en une injection unique intramusculaire de 2 grammes.
    Le plus souvent on associe a ce traitement un traitement anti-chlamydiae spécifique de part la fréquence d'infection simultanée (azithromycine 1 gr en une prise ou doxocycline 200 mg par jours pendant 7 jours.

   Traitement de l'urétrite à chlamydia: cyclines, macrolides et certaines quinolones.
    - doxycycline 2 x 100 mg par jour pendant 7 jours par voie orale.
    - minocycline 2 x 100 mg par jour pendant 7 jours par voie orale.
    - azithromycine (Zithromax): 1 gr par voie orale en une prise (soit 4 comprimés).
    - ofloxacine: 400 mg par jour pendant 7 jours par voie orale.
    - chez la femme enceinte: érythromycine (500 mg x 4 par jours pendant 7 à 21 jours) ou amoxicilline.

   Traitement d'une urétrite à mycoplasme et uréaplasma:
    - doxycycline 2 x 100 mg par jour pendant 7 jours par voie orale.
    - minocycline 2 x 100 mg par jour pendant 7 jours par voie orale.
    - érythromycine 500 mg x 4 par jours pendant 7 jours.
    - pristinamycine 4 à 6 cp de 500 mg par jours en deux à trois prises, pendant 7 jours.

    Traitement de l'urétrite à Trichomonas:
    - métronidazole (Flagyl): 2 cp de 250 mg par jour pendant 10 jours par voie orale.
    - tinidazole (Fozogine): 4 cp en une prise unique par voie orale.

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Docteur B. d'ACREMONT - Mise à jour le 01-Jan-2015