SOMMAIRE
Méthodes
de traitement du cancer de la prostate
Prostatectomie: préparation et protocole opératoire
Suites opératoires
Complications
METHODES DE TRAITEMENT DU CANCER DE LA PROSTATE
Vous devez être opéré d’un cancer de la prostate en effectuant une prostatectomie radicale. Il s’agit d’une méthode de traitement dont le but est d’enlever toute la prostate et donc la tumeur qu’elle contient. L’ablation de la prostate emporte également les vésicules séminales, deux glandes situées en haut et en arrière de la prostate elle-même. Elle peut se pratiquer par laparotomie (incision abdominale sous l'ombilic) ou par coelioscopie (par 4 à 5 orifices dans la paroi de l'abdomen). Cette intervention est à mettre en parallèle à la radiothérapie prostatique dont le but est le même à savoir détruire la tumeur prostatique. Chez des patients ayant un cancer de la prostate cliniquement localisé à faible ou très faible risque de progression, il est possible de proposer, chez des patients bien informés et demandeurs, une surveillance dite active. Contrairement à l’abstention-surveillance, la surveillance active est une option thérapeutique curative qui retarde l’éventuel moment du traitement en minimisant le risque de devoir traiter une maladie devenue alors localement dépassée.
A côté de ces deux méthodes dites curatrices, dont l’objectif est de supprimer la tumeur et donc de guérir définitivement, il existe en matière de cancer de prostate d’autres traitements possibles.
Le premier est l’abstention. En effet il s’agit en général de tumeurs à évolution lente et selon leur âge de découverte, l’état général du patient et la taille de la tumeur il peut être plus raisonnable de décider une simple surveillance pour ne pas risquer les effets indésirables de tout traitement pour un bénéfice en terme d’espérance de vie ou de confort de vie très faible chez des patients dont l'espérance de vie est de moins de 10 ans approximativement. Cette attitude est donc celle généralement préconisée chez des hommes âgés ou parfois si une pathologie associée contre-indique un traitement radical.
Le second traitement est un traitement hormonal ou plus exactement anti-hormonal. Il utilise la dépendance habituelle des cellules prostatiques et en particulier tumorales à l’hormone mâle (testostérone) sécrétée par les testicules sous l’action de médiateurs eux mêmes produits par l’hypophyse. On peut donc par différents moyens bloquer la fabrication de cette hormone (on parle alors de castration qui peut être chirurgicale ou maintenant chimique par des injections mensuelles ou trimestrielles) ou empêcher l’action de celle-ci dans les cellules prostatiques (médicaments anti-androgènes). L’utilisation des hormones féminines, premier traitement du cancer de la prostate ne se fait plus ou que dans des cas très particuliers. Le traitement hormonal ne peut pas détruire définitivement la tumeur. Il nécessite donc d’être maintenu en permanence mais peut parfois être proposé de façon intermittente pour limiter son retentissement sur le plan sexuel notamment. Dans certains cas la tumeur peut soit d’emblée, soit au cours du traitement, devenir résistante à cette thérapeutique et poursuivre son évolution malgré la privation en testostérone induite par celui-ci. On parle alors d’échappement hormonal.
D'autres méthodes sont actuellement proposées mais restent en cours d'évaluation de leurs résultats à long terme, par exemple l'ABLATHERM® utilisant des ultra-sons focalisés pour détruire la tumeur. Cette technique nécessite le plus souvent la résection endoscopique préalable de l'adénome prostatique du fait des risques importants de rétention dans les suites de la scéance. Elle est actuellement plutôt proposée dans les échecs de la radiothérapie comme traitement curateur de rattrapage, ou lors de contre-indications à une chirurgie radicale.
PROSTATECTOMIE PAR VOIE RETRO-PUBIENNE: PREPARATION ET PROTOCOLE
Avant
l'intervention on vérifiera l'absence d'infection urinaire par une analyse
d'urine (ECBU).
Une préparation intestinale peut être effectuée
par un régime sans résidu mis en route quelques jours avant l'intervention
et/ou par un lavement évacuateur le veille.
Un rasage de l'abdomen et du pubis est effectué la veille
de l'intervention.
L'intervention se déroule sous anesthésie générale
et se fait le plus souvent par une incision médiane, entre l'ombilic
et le pubis. Parfois d'autres incisions sont possibles.
Selon les cas, un curage ganglionnaire au niveau iliaque (curage
ganglionnaire) est effectué en début d'intervention pour vérifier
l'absence d'atteinte métastatique de ces ganglions. En effet s'il existe
déjà un envahissement des ganglions par la tumeur, l'intervention
n'est habituellement plus justifiée car fait prendre le risque de séquelles
liées à la prostatectomie en perdant son intérêt
en terme de guérison du cancer de prostate.
L'intervention consiste ensuite à retirer la prostate et
les vésicules séminales, puis à rétablir la continuité
entre la vessie et l'urètre par une suture entre les deux. Selon la localisation,
l'importance de la tumeur, les difficultés opératoires, il sera
possible ou non de préserver les pédicules vasculo-nerveux latéraux,
contenant les nerfs érecteurs. Une sonde vésicale est placée
pour faciliter la cicatrisation de cette suture et des drains aspiratifs sont
laissés habituellement de chaque côté pendant quelques jours.
Le plus souvent, le patient sort de la salle d'opération avec
une sonde vésicale sortant par l'urètre, deux drains aspiratifs
extériorisés de chaque côté par la paroi du petit
bassin, une perfusion au niveau d'un bras.
Comme après toute incision, des douleurs au niveau de la paroi de l'abdomen sont fréquentes pendant les jours suivants l'intervention. Un traitement anti-inflammatoire et antalgique est alors prescrit par voie intra-veineuse initialement, puis per os. Dans certains cas on peut utiliser des pompes à morphine, dispositif installé sur la perfusion et qui permet par une impulsion donnée par le patient lui-même sur une petite poire-interrupteur, de délivrer une dose fixe de morphine. Ce dispositif est muni d'un contrôle qui limite la dose délivrée à un certain seuil horaire.
Parfois, la sonde urétrale peut être mal tolérée donnant de fausses envies d'uriner, parfois à l'origine de fuites d'urine le long de la sonde lors des accès douloureux. Cela correspond à des "poussées ou contractions sur sonde". Elles nécessitent de bien vérifier la perméabilité de la sonde qui peut être obstruée. Si la sonde est bien perméable ce qui est la règle, un traitement antispasmodique vésical pourra améliorer ce phénomène qui s'estompe en principe dans les jours suivant l'intervention.
Le patient est levé dès le lendemain (pour limiter le risque de phlébite, faciliter la reprise du transit,..). La reprise de l'alimentation peut habituellement se faire dès le lendemain et progressivement.
Les drains aspiratifs seront ôtés dès leur débit faible. Parfois l'écoulement de d'urine ou de lymphe peut persister et devenir abondant. Dans ce cas, le vide peut être retiré du flacon de recueil et le drain mis en débit libre afin de permettre son ablation dès le débit ralenti et pratiquement tarit. Cette ablation peut parfois n'être possible qu'au bout de plusieurs jours, parfois plus d'une semaine.
La sonde vésicale est retirée entre 6 et 10 jours selon les opérateurs et selon le déroulement de l'intervention et de ses suites immédiates. Parfois une opacification par la sonde en service de radiologie peut être effectuée immédiatement avant son ablation pour s'assurer de l'étanchéité de la suture entre la vessie et l'urètre. A l'ablation de la sonde des fuites parfois importantes sont habituelles mais régresseront le plus souvent en quelques jours ou semaines. Une auto-rééducation sera apprise au patient pour accélérer cette rééducation mais sans être trop précoce afin d'attendre une cicatrisation minimum des sutures.
Un traitement anticoagulant à dose préventive par injection quotidienne sous-cutanée d'un dérivé de l'héparine est indispensable et sera habituellement poursuivi au retour du patient à son domicile pendant plusieurs jours. Ce traitement peut être complété par des bas de contention veineuse mis en place avant même le début de l'intervention.
L'ablation des fils et agrafes se fait entre 7 et 10 jours habituellement.
La sortie est le plus souvent possible entre 7 et 10 jours après l'intervention. Après la sortie, une période de convalescence est nécessaire, variable selon les suites opératoires, l'âge, mais se situe en général entre 1 à 2 mois. La reprise d'une activité physique sportive ne pourra s'envisager qu'après 2 mois.
Une surveillance est alors nécessaire pour vérifier la cicatrisation pariétale, la récupération des fonctions sphinctériennes et sexuelles, et l'absence de récidive tumorale par des dosages réguliers (tous les 6 mois) du taux de PSA.
Pendant l'intervention et l'hospitalisation:
-
risque de plaie du rectum pendant l’intervention. Très rare, cette plaie
est alors suturée pendant l’intervention. Elle peut exceptionnellement
nécessiter la confection d’un anus artificiel provisoire pour permettre
sa cicatrisation. 0,2 à 9 %.
- plaie d'un uretère qui sera alors réparé
pendant l'intervention.
- hémorragie pendant l'intervention. Elle nécessite
rarement une transfusion. Le plus souvent si le saignement a été
important, la prescription d'une supplémentation en fer accélérera
la récupération d'un taux d'hémoglobine normal.
- hématome pelvien. Il va habituellement spontanément
se résorber, mais important il pourra nécessiter une réintervention
pour être évacué.
- infection urinaire. Elle est systématiquement recherchée
une fois la sonde retirée et traitée par antibiotique si nécessaire.
- abcès de paroi sur la cicatrice. Il nécessite
alors le plus souvent des soins locaux, parfois des antibiotiques et exceptionnellement
une intervention pour être évacué.
- fistule urinaire par les drains aspiratifs: les drains et
la sonde urinaire seront alors laissés plus longtemps, le vide des drains
aspiratifs pourra être retiré pour faciliter la fermeture de la
communication entre la suture et le drain et aider la cicatrisation de cette
fistule.
- lymphorrhée: écoulement de lymphe par les
drains aspiratifs. Cet écoulement doit être différencié
un écoulement d'urine mais en pratique l'attitude sera voisine, à
savoir le maintien du drainage. Une fois les drains retirés, peut se
produire une collection de lymphe au niveau des curages ganglionnaires: il s'agit
d'une lymphocèle. Cette collection nécessite rarement une réintervention
pour être drainée, parfois une ponction sera suffisante lorsqu'un
geste est nécessaire.
- phlébite et embolie pulmonaire: 1 à 7 %
- infections nosocomiales: infections à certains germes,
souvent résistants, contractées à l'hôpital. Ces
infections peuvent intéresser le site opératoire, le reste de
l'appareil urinaire, les poumons, les cathéters intra-veineux,… Le taux
d'infection nosocomiale est globalement de l'ordre de 6 à 7 % tous services
et toute pathologie confondue (enquête de prévalence sur une journée
en 1996).
- comme pour tout acte chirurgical, certaines complications
imprévisibles parfois mortelles peuvent s'observer tenant à des
variations individuelles parfois imprévisibles, à l'âge,
à la pathologie présentée. Lors de l'intervention un évènement
ou des constatations imprévues pourront modifier le déroulement
de l'intervention et faire envisager un ou plusieurs gestes non prévus
initialement.
-
une fois la pièce opératoire retirée, elle est examinée
au microscope afin de vérifier les limites de la tumeur. Lorsqu'il existe
un risque local de récidive du fait d'une extension au-dela de la capsule
prostatique, un traitement complémentaire par radiothérapie, et
parfois traitement hormonal peut être nécessaire. Le dosage régulier
du PSA en post-opératoire et pour la surveillance est d'un grand intérêt
pour vérifier la guérison: l’absence de cellules prostatiques
doit le faire devenir indosable.
- risque de lymphocèle (collection de liquide lymphatique
au niveau des ganglions prélevés de chaque côté du
petit bassin). 1 à 6 %. Cette collection nécessite rarement une
réintervention pour être drainée, parfois une ponction sera
suffisante lorsqu'un geste est nécessaire.
- risque d'éventration de la paroi surtout sur ses
extrémités (au-dessus du pubis, ou au contraire près de
l'ombilic). Une intervention peut alors être nécessaire.
-
risque d’impuissance : lié à la proximité des nerfs
érecteurs et de la prostate. La dissection chirurgicale peut les léser
ou imposer leur sacrifice. Le risque d’impuissance est donc de l’ordre de 30
à 90 % et augmente avec l'âge des patients. La récupération
de l'érection peut être tardive, plus d'un an après la prostatectomie.
Différents protocoles tentent de préciser l'intérêt
d'un traitement permettant d'accélerer cette récupération
par des auto-injections intra-caverneuses précoces.
- Il n'y a plus d'éjaculation possible mais par contre
l'orgasme et donc la sensation de plaisir demeure, modifiée malgré
tout par l'absence d'éjaculation.
- risque d’incontinence urinaire, fréquent dans les
jours et semaines qui suivent l’intervention mais la récupération
est complète dans les 6 mois qui suivent l’intervention chez 90 % des
patients. Dans les cas d’incontinence persistante et importante, la mise en
place d’un sphincter artificiel reste possible (environ 3 % des patients).
- risques plus tardifs de rétrécissement de
l'urètre ou de l'anastomose entre vessie et urètre. Il peut être
nécessaire d'intervenir par voie endoscopique pour inciser ce rétrécissement
avec malgré tout un risque de voir apparaître ou réapparaître
alors une incontinence d'urine.
Une surveillance est donc nécessaire pour vérifier la cicatrisation pariétale, la récupération des fonctions sphinctériennes et sexuelles, l'absence de complications à distance de l'intervention et l'absence de récidive tumorale par des dosages réguliers (tous les 6 mois puis annuels) du taux de PSA.
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Docteur B. d'ACREMONT - Mise à jour le 29 décembre 2014